Plateformes web : vos travailleurs sont-ils « indépendants » ?

Plateformes web : vos travailleurs sont-ils « indépendants » ?

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Si vous exploitez une plateforme de mise en relation, vous devez savoir que vous êtes tenu à des obligations spécifiques à l’égard des travailleurs indépendants qui recourent à vos services. Mais sont-ils réellement « indépendants » ? C’est ce que s’efforcera de vérifier le juge en cas de contentieux…


Travailleur indépendant = « indépendant »

Dans une affaire récente, une plateforme web a rompu le contrat qui la liait à un travailleur indépendant, à la suite de plusieurs manquements contractuels. Ce dernier a alors contesté cette rupture devant le juge, estimant être en réalité « salarié » de la plateforme.

Cette société utilise une plateforme web et une application mobile pour mettre en relation des restaurateurs partenaires, leurs clients passant commande via la plateforme et des livreurs à vélo exerçant en tant que « travailleurs indépendants ». Ces derniers inscrivent, selon leurs convenances, leurs disponibilités. Ils disposent donc d’une grande liberté dans leur organisation.

Cependant, le livreur évincé souligne que la société a mis en place un système de bonus/malus selon lequel le livreur percevrait un bonus kilométrique lié au dépassement de la moyenne kilométrique des coursiers ou serait soumis à une pénalité dans certains cas, et notamment :

  • en l’absence de réponse à une sollicitation téléphonique ;
  • en cas d’incapacité de réparer une crevaison ;
  • en cas de refus d’effectuer une livraison ;
  • en cas de circulation sans casque ;
  • en cas de retards importants ;
  • en cas de circulation avec un véhicule à moteur ;
  • en cas de comportement insultant ;
  • en cas de comportement grave.

Si l’application d’une pénalité sur un mois ne porte à aucune conséquence, l’application de 2 pénalités supprime le bénéfice du bonus ; celle de 3 pénalités donne lieu à un entretien entre la plateforme et le coursier pour parler de la motivation de ce dernier et l’application de 4 pénalités entraîne la désactivation du compte et la désinscription des plages horaires réservées par le coursier.

Et parce que ce livreur a précisément fait l’objet de ce dispositif, il y voit là la matérialisation d’un lien de subordination, renforcé par le dispositif de géolocalisation intégré dans l’application mobile qui permet, en effet, de suivre, en temps réel, la position du livreur et le nombre total de kilomètres qu’il a parcourus.

Ce que confirme le juge qui rappelle que le lien de subordination se caractérise par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements du travailleur. Et il constate effectivement que la plateforme web dispose, ici, d’un pouvoir de direction et de contrôle de l’exécution de la prestation.

La relation de travail liant le livreur à la plateforme constitue donc, ici, une relation de salariat. La rupture de leur relation s’analysera donc en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Source : Arrêt de la Cour de Cassation, chambre sociale, du 28 novembre 2018, n° 17-20079

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